Description
Beau modèle de dressoir ou crédence en noyer blond, de la Seconde Renaissance française, reposant sur une plinthe à pied boules.
Ce meuble de composition architecturée, présente un corps surélevé reposant sur un bel entablement de quatre colonnes doriques renflées. Il ouvre en façade par deux vantaux et deux tiroirs.
Ce dressoir relève d’un modèle proche des projets faits et publiés par Androuet du Cerceau au milieu du XVIe siècle pour architecturer le meuble. Il appartient à ce courant stylistique qui nait alors en Ile de France et en Val de Loire, où la composition est d’inspiration « classique », toujours harmonieuse et sobre, par réaction au style ultramontain qui prédomine alors dans les autres régions.
Encore de structure médiévale (il conserve la structure traditionnelle des dressoirs gothiques), ce dressoir peut être tout à la fois d’apparat, ou destiné aux repas.
La composition d’ensemble de ce dressoir répond bien aux premières définitions de ce genre de meubles, considérés comme des coffres surélevés et dénommés « dressouers ». Notre modèle, encore un peu trapu, mais de belle harmonie a été conçu dans un esprit essentiellement architectural durant la seconde moitié du XVIe siècle. Les colonnes d’ordre dorique qui soutiennent le corps du haut, ses entablements, ses motifs géométriques et ses consoles de frise grassement moulurées, sont bien spécifiques de l’époque Henri II. Les colonnes à fût fixes et baguées servant de support, sont volontairement massives afin de rester en harmonie avec l’importance du corps supérieur. La base est particulièrement structurée et s’achève par une sobre moulure.
Si la beauté de ce meuble réside surtout dans l’harmonie de ses proportions, toujours inspirées des projets des théoriciens français de cette époque, sa décoration de bois clair et de bois foncé dénote une origine méridionale. En effet, dans la région toulousaine, le rôle important joué par Nicolas Bachelier, qui travailla à Rome dans l’atelier de Michel-Ange, et connu aussi bien dans le domaine de l’architecture (château et église d’Assier) que dans celui de la sculpture (premier portail de l’église Saint Sernin de Toulouse), et en art du meuble. On cite de lui un cabinet en noyer à deux corps superposés, dont les panneaux so nt revêtus de marqueterie de bois.
Ce dressoir se place donc au croisement de deux grands courants : artistique et stylistique. Il offre une conception toute empreinte d’harmonie et d’équilibre qui appartient à l’école française du Val de Loire et de l’Ile de France, mais présente une décoration de marqueterie spécifique aux ateliers du Sud Ouest, dont Nicolas Bachelier est le maître spirituel.
Dans un état de conservation remarquable et de très belle facture, ce meuble est un exemple accompli des riches productions des différentes écoles de la Seconde Renaissance Française. Réalisé dans un très beau noyer clair, il possède une patine remarquable.
Bibliographie
Le mobilier. Alfred de Champeaux. 1884
Le mobilier domestique. Nicole de Reynier, au CNMH.
Le mobilier français du Moyen-Age à la Renaissance. J. Boccador. Editions Monelle Ayot. 1975