Description
Rare armoire de Palais en noyer sculpté ouvrant à quatre vantaux en façade et deux grands tiroirs en partie basse. Elle présente un important décor d’architecture en bas-relief et des montants à cannelures et chapiteaux ioniques.
Le corps supérieur
Deux vantaux sculptés d’architectures en perspectives ouvrent le meuble encadrés par trois pilastres cannelés aux chapiteaux ioniques.
Chaque vantail représente deux arcades plein-cintre dont la corniche et la base trahissent un point de fuite central. De même, les lignes du pavement sont pour l’artisan l’occasion d’accentuer cet effet de profondeur. Les voûtes de ces arcades laissent toutefois penser que le point de fuite se trouve au niveau de la poignée, entre ces deux reliefs alors complémentaires.
La ceinture est travaillée élégamment par des moulures, dont la centrale est à doucine. Pas de tiroirs comme il est habituel, en revanche, depuis l’intérieur du corps supérieur est accessible un compartiment secret s’ouvrant au moyen de deux charnières. Il occupe l’ensemble de la ceinture.
Le corps inférieur
Deux vantaux identiques à ceux du corps supérieur sont encadrés par trois pilastres doriques cannelés. La base du meuble ouvre par deux grands tiroirs.
Les côtés présentent eux aussi des panneaux travaillés en bas-reliefs figurant la même vue d’architecture en perspective. Notons que les pilastres faisant angles sont réunis aux pilastres de façade par leurs chapiteaux. Ainsi sur les côtés de cette armoire peut-on observer la partie latérale des volutes caractéristiques de l’ordre ionique.
Cette armoire de Palais est surmontée par une corniche débordante reposant sur trois consoles en façade et deux sur chaque côté. Placées dans la continuité des pilastres, les consoles sont ornées en surface par un motif de feuille épanouie.
Au XVe siècle l’intérêt majeur pour l’architecture d’une part et pour les études sur la perspective d’autre part influe sur le goût des commanditaires. Les publications au milieu du XVe siècle des recherches menées par les grands théoriciens Leon Battista Alberti ou Filippo Brunelleschi ont une influence majeure sur les arts.
Ceci apparait dans le domaine de la peinture où de nombreux bâtiments sont souvent insérés quelque soit le sujet et parfois devenant eux-mêmes le sujet principal. Cela apparait aussi dans le mobilier avec la réalisation de crédences, cabinets ou armoires nourri par un vocabulaire architectonique jusqu’à évoquer de véritables facades palatiales.
Cette puissante armoire aux panneaux à la fois sobres et sophistiqués représentant des arcades, rappelle immédiatement cette fascination propre à la Renaissance. Dans les arts décoratifs ces sujets de trompe-l’œil étaient majoritairement réalisés en marqueterie. La conception d’une vue d’architecture en perspective, sculptée dans une seule planche de bois massif, était bien plus difficile à accomplir et nécessitait une très grande maîtrise de la technique et du matériau. Ainsi notre cabinet est à la fois très inhabituel et un rare témoignage de son époque.
Tandis que les coffres étaient destinés à abriter le linge de ses propriétaires, il était en revanche plus courant que les armoires renferment armes, objets de collection et de curiosité.
Le sens des proportions et des volumes de cette armoire est oeuvre d’un véritable artiste-architecte. L’unité du décor, son élégance et son raffinement répondent à la commande d’un mécène amateur de géométrie et d’architecture.