Description
Ce Christ en bois porte les stigmates du temps, sans que cela n’altère sa grâce ni amoindrisse son intérêt.
Il conserve encore certaines caractéristiques du XIIe siècle. Ainsi, bien que les pieds soient manquants, la position de ses membres inférieurs, parallèles l’un à l’autre semble indiquer que ses pieds étaient placés côte-à-côte, sans se croiser, rappelant les crucifix du XIIe siècle. Les vestiges de son perizonium laisse à penser que ce dernier, fort court découvrait ses deux genoux et une partie de ses cuisses. Il garde également un corps droit, des bras nettement horizontaux, deux mains ouvertes – aux paumes autrefois transpercées par les clous – et les pouces parallèles aux autres doigts, comme dans la plupart des Christ de ce siècle.
Toutefois, certains indices inscrivent clairement ce Christ parmi les réalisations du XIIIe siècle. L’anatomie, bien que peu indiquée, semble abandonner la tradition byzantine, toujours d’usage au XIIe siècle. Le sculpteur a cherché davantage de réalisme, il s’est attaché à rendre le corps plus naturel. La tête se penche sur la poitrine, en s’inclinant légèrement vers la dextre. Cette représentation se conforme ainsi aux Écritures : « Et inclinato capite tradidit spiritum » (Jean, XIX-30, « Et inclinant la tête, il rendit l’esprit »).
Il porte une barbe bien dessinée, rendue par incisions. Bien qu’usée, on peut encore restituer sa chevelure, dont quelques mèches tombaient sur les épaules. Il reste en outre ce qui semble être les vestiges d’une couronne qui ceignait la tête de Jésus.
Ce dernier présente un visage doux et apaisé. Les pommettes apparaissent légèrement saillantes, le nez droit et les arcades sourcilières surmontent des yeux bien dessinés à demi clos, les paupières baissées. Sa bouche est légèrement entrouverte. Le Christ semble accepter son sacrifice et accueille sereinement l’éternité. Aucune contracture, aucune expression outrancière de la douleur ne vient avilir son beau visage.
« En vérité, tant de mesure dans le réalisme, tant de noblesse alliée au tragique, n’est-ce pas là le caractère de l’Art Français du XIIIe siècle ? » (Paul Thoby, Le Crucifix des Origines au Concile de Trente, Bellanger, Nantes, 1959, p. 149)
Ce mélange entre tradition et modernité pourrait ainsi placer la réalisation de cette sculpture dans le premier tiers du XIIIe siècle.